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Wiin. La prophétie des abeilles Camille Tooubi x Laurent Védrine
Vernissage le samedi 14 Septembre
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L’artiste y partage son savoir de l’histoire et des légendes de Ouidah, tout en évoquant ses propres souvenirs. Lieu de rencontre entre les morts et les vivants, Ouidah est une ville où l’influence du passé sur le présent se manifeste continuellement, où le temps observe nos actions. À chaque personne cherchant des réponses, l’installation de Georges Adéagbo propose des sources et des échos, des hasards du présent et des leçons à tirer du passé, une forêt d’indices dont nous pourrons ressortir avec une connaissance plus fine du monde et de nous-mêmes.
Georges Adéagbo, est artiste, philosophe et conteur. A quatre-vingts ans, il voyage de continent en continent pour présenter ses installations, vastes collections élaborées spécifiquement pour l’espace d’exposition et le pays qui les accueillent. C’est à Cotonou, en 1971, que l’artiste a commencé à rassembler des objets et des écrits pour les disposer en installations. Ses premières collectes d’objets oubliés ou abandonnés ont lieu lors de promenades solitaires dans les vonsnocturnes de Cotonou et sur la plage, et donnent lieu à de petites installations dans la cour de la parcelle familiale. Sa pratique reste confidentielle jusqu’à ce qu’il reçoive en 1993, par hasard, la visite de Jean-Michel Rousset, assistant du commissaire d’exposition André Magnin. Dès lors, l’artiste connaît très vite la consécration : six ans plus tard, en 1999, il est le premier artiste africain à se voir décerner un prix du jury à la Biennale de Venise, pour son installation Venise d’hier, Venise d’aujourd’hui lL’histoire du lion, au Campo dell’Arsenale. Cet évènement marque aussi sa première collaboration avec Stephan Köhler, qui sera le coordinateur de toutes ses expositions.
La force des installations de Georges Adéagbo, est qu’elles évoquent directement sa vie, telle qu’elle lui est donnée, et telle qu’il la reçoit. Georges Adéagbo crée grâce à des objets trouvés et grâce aux œuvres des autres, réunissant livres, journaux, disques, sculptures ou vêtements pour les agencer minutieusement en frise, au sol et au mur. La simplicité apparente du procédé permet de réaliser l’essentiel : les choses sont là, et c’est à nous, lorsqu’elles croisent notre chemin, de prêter attention à leurs enseignements, d’accommoder notre regard à ce qui n’a pas été assez vu. L’artiste nous met sur la voie de cet exercice de lecture en laissant dans l’installation des traces de sa propre méditation, sous la forme de messages, proverbes, oracles et hypothèses écrits de sa main dans un français déconstruit.
Dans chaque livre, chaque objet et chaque image muette se cachent des réponses aux énigmes qui composent le monde. En les plaçant côte à côte et en laissant leurs relations formelles ou sémantiques provoquer la composition, Georges Adéagbo, permet à ces morceaux du monde de dialoguer, de construire une narration. Ce faisant, il installe un régime de réalité alternatif par rapport à la logique discursive héritée de l’Occident, une pratique visuelle et linguistique qui laisse la première place au monde, et non à l’artiste; à la spéculation empirique, plutôt que rationaliste. Grand conteur et grand ordonnateur, l’artiste pose des questions et laisse la réponse aux choses qu’il rencontre - la formule « l’art est dans la nature» revient comme un refrain dans plusieurs de ses installations.
La vie de Georges Adéagbo, marquée par la solitude et la souffrance, a été guidée naturellement vers un destin d’artiste reconnu. Autodidacte, il a gardé une grande liberté de parole dans le monde de l’art conceptuel. Il explique volontiers son travail sur l’espace, décrypte les messages que ses groupes d’objets véhiculent, nous livre avec franchise son histoire, ses rêves et ses convictions. Sa pratique de l’installation n’est pas séparée de sa vie : chaque jour, il cherche, classe et ordonne documents et objets qui nourrissent sa réflexion sur le monde. Dans son œuvre, on voit se réconcilier le familier et l’érudit, le fantastique et le fonctionnel, sans catégorisations hiérarchiques. Georges Adéagbo nous invite à prendre le temps de relire le monde avec une curiosité intacte. Les images sereines illustrant un calendrier peuvent côtoyer des sculptures du Moyen Age occidental et du Bénin actuel : comme dans la vie, le temps prend une qualité élastique et relative, les cultures se mêlent, les langages s’interpénètrent. Nous abordons des idées universelles - la religion, l’art, l’amour, la filiation, la connaissance - en explorant ce que nous avons devant nous, et en choisissant les choses qui nous apporteront des réponses. Cette disponibilité au monde est ce qui fait la grande radicalité de l’œuvre de Georges Adéagbo: contestant les systèmes logiques d’une culture occidentale dominante, déconstruisant la langue de l’ancien colonisateur, l’artiste propose un système ouvert dans lequel la pensée de chacun peut se déployer librement.
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Georges Adéagbo was awarded the DAAD Prize in 2006, as well as the Finkender Prize in 2017 and the Smithsonian Artist Research Fellowship in 2020. Together with Stephan Köhler, founder of Kulturforum Süd-Nord Cotonou-Hamburg, the artist presents his works in major institutions such as Kindl, Berlin (2021) ; Maison Tavel, Musée d’art et d’histoire, Geneva (2021) ; Warburg-Haus, Hamburg (2019) : Musée des Beaux-Arts, Rouen (2018) ; Kunsthaus Hamburg (2017) ; Israel Museum, Jerusalem (2016) ; Moderna Museet, Stockholm (2014) ; MAK, Vienna (2009) ; Palazzo Vecchio, Florence (2008) ; Ludwig Museum, Cologne (2004) ; Toyota Municipal Museum of Art, Toyoto (2000) ; MoMA PS1, New York (2000) or Le Quartier, Centre d’art contemporain, Quimper (1997).
Georges Adéagbo’s works are held in various museum collections, including the Centre Pompidou, Paris; Centre national des arts plastiques, Paris; Musée d’Art et d’Histoire, Geneva; Sammlung zeitgenössischer Kunst der Bundesrepublik Deutschland, Berlin; Philadelphia Museum of Art, Philadelphia; Toyota Municipal Museum of Art, Toyoto; KIASMA, Helsinki; Ludwig Museum, Cologne; and Israel Museum, Jerusalem, among others.
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Le Guèlèdé est un culte yoruba séculaire, toujours célébré dans certaines parties du Bénin et inscrit au patrimoine immatériel de l’humanité par l’UNESCO. Au cours de cérémonies qui marquent des temps forts (mariages, naissances, décès, festivités annuelles), organisées la nuit ou le jour, ces masques sortent des couvents familiaux et sont portés par les initiés pour des danses et chants rituels. C’est une société secrète où, cas unique, les femmes ont un rôle actif. Le Guèlèdé représente un visage féminin à l’esthétique yoruba, yeux en amande et scarifications, surmonté de sculptures plus ou moins complexes qui représentent des animaux, des personnages moquant un clan rival, et, c’est plus récent, des scènes de la vie quotidienne ou des préoccupations de la communauté afin de sensibiliser, d’éduquer.
Kifouli Dossou connaît bien cette tradition. Né en 1976 à Covè, il vit et travaille dans cette petite ville, où le culte Guèlèdé perdure. L’odeur du bois taquine les narines du visiteur qui entre dans la cour de sa maison alors que son fils aîné, en vacances, ponce un masque en devenir. Voilà la nouvelle génération en apprentissage. Chez les Dossou, tout est transmission : le père sculptait des jouets, l’oncle des Guèlèdé, le grand frère Amidou aussi (NB : Cet artiste talentueux, disparu en 2013, participa à l’exposition-événement Magiciens de la Terre en 1989 à Paris). Aujourd’hui, Kifouli Dossou sublime et transcende l’héritage. Par la finesse du geste, le génie de la main, ces dix doigts capables de faire naître d’un morceau de bois, de la masse d’un tronc des pièces minutieusement travaillées, ciselées. D’abord saisi par le réalisme, la beauté, le sens du détail, l’humour, on en oublie presque la performance sculpturale. Mais il n’est pas qu’un technicien horspair : il modernise les représentations, il innove, il s’affranchit aussi de certaines conventions.
Ainsi, il s’autorise à créer des « epa », d’imposants masques colonnes, sans les doter de l’habituel personnage central à cheval. Les siens portent des récits et transmettent des enseignements. C’est le cas des deux pièces majestueuses inspirées par la ville de Ouidah et réalisées pour l’exposition. Avec « cultivons l’intelligence », il observe le marché Kpassé, principal lieu d’échanges de Ouidah (ancien comptoir d’exportation de l’huile de palme et sinistrement, d’êtres humains lors de la traite négrière). Vendeuses, acheteurs et voleurs, tous se mêlent et s’emmêlent chacun à sa place ! Kifouli Dossou traite aussi de la tolérance religieuse de la cité, souvent montrée en exemple. Le temple des Pythons, sanctuaire vodoun dédié à cet animal sacré, fait face à la basilique de l’Immaculée-Conception parce que les adeptes ont accueilli les missionnaires et leur ont offerts le terrain. L’histoire retient qu’ils ont même aidé à la construction de l’édifice. Mais l’artiste prend soin de placer les pythons à la base de l’« epa ». Comme pour signifier que la spiritualité des ancêtres est fondatrice.
Ses œuvres font partie des collections de la Fondation Zinsou, de la Fondation Pigozzi, entre autres. L’exposition sera visible du samedi 3 juin au dimanche 27 août 2023.
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Cette question se manifeste d’abord dans l’intimité. L’installation Ashè, qui prête son nom à l’exposition, est composée de plus d’une centaine d’assiettes appelées Kpaneu, une vaisselle traditionnellement offertes en dot aux mariées par la famille de leurs époux et utilisée par les femmes comme instruments de percussion lors des fêtes, pour performer le rythme Kpanouhoum. L’écho de cette musique nous parvient, mais avec une subtile dissonance : fixés sur le pourtour des assiettes comme des grelots, nous découvrons des centimes de Francs CFA et d’Euros. Cette vaisselle, symbolique de l’héritage domestique, témoin de la résistance d’une tradition dans le quotidien contemporain postcolonial, a été dévaluée. De nos jours, les assiettes sont en métal émaillé, fabriquées en Chine, et ont perdu une grande partie de leur valeur matérielle. En s’incarnant dans des objets moins durables, la tradition cède devant des contraintes économiques et politiques qui fracturent les identités; pourtant elle perdure, et résonne encore au cour du foyer.
La réalité composite du présent est liée à notre compréhension de l’Histoire. Ishola Akpo, depuis plusieurs années, questionne notre lien avec le passé ancestral dans sa série Traces d’une reine, dont il présente trois collages récents. Sur des gravures de l’époque coloniale représentant la cour de rois africains, l’artiste colle et coud des femmes incarnant les reines et reines-mères d’Afrique. Souvent absentes des archives, effacées des récits, anonymisées, ces reines étaient pourtant détentrices de pouvoirs déterminants pour la protection de leurs royaumes, et donc pour la perpétuation de leurs cultures. Leurs pouvoirs étaient politiques et militaires, mais ils étaient aussi liés au monde surnaturel des esprits. En reconstruisant l’image de leur puissance, Ishola Akpo les inclut dans le récit collectif africain, et formule un renouvellement radical de notre rapport à l’Histoire. Car dans ce récit, l’artiste ne masque pas la superposition des époques qu’il évoque : il signale au contraire, par ses minutieuses broderies de fil rouge, le lien qui doit s’établir entre les strates du temps.
Un tirage unique du collage Défilé des troupes, 2023, est présenté dans des dimensions comparables à celles d’une peinture d’histoire. La stature monumentale de la reine nous apparaît devant une perspective profonde, où des préparatifs militaires se déroulent sous le regard de riches colons. Mais la reine se tourne vers nous et son regard nous interpelle frontalement. Son visage est familier, empreint de dignité, comme habité par un esprit héroïque. A quel temps appartient cette reine ? Au passé précolonial, qu’elle incarnait pour ses contemporains ? Au temps de la colonisation, qu’elle affrontait ? A notre époque contemporaine, où son image apparaît ? Roland Barthes écrivait que les personnes photographiées deviennent des spectres, qui habitent pour toujours un instant suspendu du temps. Les reines d’Ishola Akpo ont cette existence fragile, faite de paroles et de papier; mais elles ont traversé les époques. Elles témoignent, devant nous, de la force intacte des récits collectifs lorsqu’ils peuvent être transmis, partagés et réappropriés.
Ishola Akpo représentera le Bénin à la 60th Biennale de Venise en 2024, aux côtés de Moufouli Bello, Chloé Quenum et Romuald Hazoumé. L’artiste présente actuellement l’exposition monographique “Léedi” à la Fondation Donwahi d’Abidjan, Côte d’Ivoire, du 22 septembre au 18 novembre 2023.
- Marguerite Hennebelle
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Pour sa troisième exposition au Bénin, l’artiste travaille sur sa surface de prédilection, le bois, d’une manière inédite. A l’image de nombreux créateurs africains, Agemo trouve ses matériaux autour de lui et c’est dans la rue, sur les chantiers de construction qu’il collecte les planches en bois. Il les assemble pour composer des « toiles » aux éléments disjoints, qu’il sculpte et grave minutieusement lorsque les lattes d’origine ne procurent pas l’effet recherché ou s’il veut l’accentuer, se servant de leurs formes atypiques, des cassures, des trous.
Le choix des planches était d’abord un choix pratique : elles sont partout et faciles à récupérer. Agemo leur a conféré un autre avantage : on peut les détacher les unes des autres et ainsi rendre les tableaux aisément transportables. Finalement le bon sens devient un concept. L’autre objet de récupération qu’il façonne, ce sont les cannettes en métal, sa seconde pièce maîtresse. L’alliance du bois et du métal rappelle les débuts d’El Anatsui, artiste ghanéen installé au Nigéria, qui s’est fait mondialement connaître avec ses monumentales tentures en capsules de bouteille.
Agemo découpe des morceaux d’aluminium qu’il fixe aux planches, mêlant ses teintes industrielles à l’acrylique. Il invente ainsi sa propre palette de couleurs. Si dans ses premiers tableaux, elles étaient éclatantes, vibrantes, gaies, associées à des portraits ou à des scènes de la vie quotidienne, ce n’est plus le cas dans la série qu’il présente à Ouidah. « J’ai réduit les couleurs pour mettre en valeur la teinte organique du bois, ses nuances, ses veines, explique-t-il. Il a une beauté naturelle que j’ai voulu montrer et finalement, cela rend le travail plus puissant ».
Cette sobriété n’est pas le résultat d’une expérimentation artistique mais d’un cheminement personnel. Ce n’est plus le village, la tradition, les rites ancestraux qui nourrissent Francis Agemo, mais Lagos, mégapole de 20 millions d’habitants où il se rend régulièrement. L’opulence y côtoie la misère, les millionnaires y croisent les hustlers, jeunes garçons débrouillards en quête de petits boulots et d’une vie meilleure. L’artiste s’inquiète pour cette jeunesse livrée à elle-même parce que les parents eux-mêmes se démènent pour leur subsistance. Money ! « Il y en a beaucoup au Nigéria mais pas pour tout le monde. Depuis un an, on a un nouveau gouvernement, on est passé d’un parti à un autre mais rien n’a changé pour le peuple, la vie était dure et c’est toujours dur ! », résume l’artiste. D’où le titre « Everything stood still », « tout est resté comme avant ».
Son message est devenu social, politique, son art est tout à la fois revendication et dénonciation : corruption, incurie, inégalités croissantes et de plus en plus choquantes dans un pays riche producteur de pétrole où l’insécurité est grande et les kidnappings sont monnaie courante. Dans son atelier, il travaille avec un groupe électrogène. Indispensable dans des villes souvent privées d’électricité. “Pas d’approvisionnement constant en électricité, enlèvements, banditisme, problèmes de sécurité et bien d’autres choses encore qui détruisent le bonheur de l’homme, cela n’a aucun sens pour moi de faire semblant, nous vivons dans l’obscurité.” Pourtant une forme de douceur se dégage de ses nouvelles pièces. Des silhouettes apparaissent lorsqu’on s’y attarde, elles se fondent dans l’abstraction autour d’elles. Comme les laissés-pour-compte dans une société qui les néglige. Francis Agemo veut leur donner corps. « C’est important pour moi de les montrer parce qu’on ne les voit pas, de les rendre visibles parce qu’ils sont invisibles ».
Francis Agemo, né en 1986 au Nigéria, vit et travaille à Badagry, ville côtière proche de Lagos. Peintre autodidacte, il a étudié les arts à l’université de Delta State d’où il est sorti diplômé en sculpture en 2008. Il a notamment exposé à Londres, Zanzibar et au Maroc, à la Montresso Art Foundation de Marrakech où il est en résidence depuis 2022.
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Esther et Cyprien
Les murs parlent.
L’acte est majeur: le passage du mur à la toile. Ces artistes ont décidé de transmettre leurs cultures au dela des frontières. La peinture quitte le temple ou la maison familiale; les oeuvres sur toiles seront les messagers. Comme des tapis volants ils vont traverser les continents.
La peinture se détache du support d’origine pour devenir l’objet tableau, nous amenant à considérer la densité philosophique et historique de cette fine couche picturale. Là se trouve la matière même des cultures Ndébélé et Fon. Un condensé, un extrait des terres et des villages qui ont vu naitre ces artistes et leurs arts. Fragiles et immenses de sens à la fois, les temples et les maisons font l’épreuve des climats, et les oeuvres murales d’autant plus.
Voici l’expression d’un désir de préservation, de protection chez ces deux artistes. Ils ont tous deux franchis la limite des traditions en détachant leurs oeuvres de leurs contextes originels, fait que l’on ne peut assimiler qu’en faisant l’expérience du terrain, de la rencontre des peuples. Ce n’est pas un petit geste que d’extraire une part de son héritage et de l’offrir au monde. Il y à là un soucis d’utilité réelle, de servir le bien commun, d’éduquer l’oeil et l’esprit de tout un chacun même à des années lumières de sa culture et de ses traditions.
Ces Peintres à la fois traditionnels et contemporains ont décidés de communiquer et de partager leur visions avec le monde, ils ont ouvert la voie pour nous et nous incitent à considérer le temps comme une matière, la peinture comme le message.
Les murs s’effritent tandis que les oeuvres perdurent. Gardiens silencieux et sages, les tableaux nous regardent et nous enseignent l’humble désir d’écrire une histoire non verbale au plus prés de l’expérience d’une vie humaine.
- Jeremy Demester
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Le centre d’art thérapie de Louis Oké-Agbo à Porto-Novo est un lieu unique : il met l’art au service de la maladie mentale et du handicap. Créé en 2017 par cet artiste-photographe béninois, il accueille des femmes et des hommes atteints de troubles psychiques, comportementaux mais aussi de déficiences. Dans cette cour aménagée en atelier, donnant sur une rue de Tokpota, quartier populaire de la capitale, ils dansent, jouent des percussions, se prennent en photo, dessinent et peignent. L’expression est libre, accompagnée par des bénévoles, artistes, psychologues, spécialistes de l’art-thérapie.
Le centre compte actuellement 17 patients, signe qu’avec ses petits moyens, il soigne, apporte bien-être et considération à ceux qui sont catalogués comme fous et sont pour cela rejetés, marginalisés. Car au Bénin, la folie n’est pas de l’ordre de la pathologie : c’est une punition infligée par les divinités à l’individu qui enfreint les règles de sa communauté, manque de respect à un esprit.
Un ensemble aux couleurs vives, personnages aux corps simplifiés, rarement seuls, souvent reliés les uns aux autres, figures vodou réinventées… Est-ce parce que jusque-là ils n’ont pas pu les dire, que David Adebayo, Hamidath Agbodedji, Bénédicte Dovonou, pour ne citer qu’eux, semblent libérer des émotions brutes ? Leurs œuvres touchent, elles entrent déjà dans des collections.
Louis Oké-Agbo se consacre à ces hommes et femmes traités en paria parce qu’il a « senti qu’avec l’art, je pouvais aider ». La photo l’a aidé, lui, l’aîné d’une famille pauvre de 12 enfants, à rester à flot. En commençant, il y a 10 ans, à photographier des fous dans la rue, début de son projet d’art-thérapie, il a tendu un miroir à ses propres fêlures. Aujourd’hui Louis Oké-Agbo et les pensionnaires du centre partagent plus que du temps et de l’attention : la place de l’art dans leurs vies.
Atlantic versera l’intégralité des ventes à l’ONG Vie et Solidarité qui gère le Centre.
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Atlantic est heureux de présenter la série Legends from W A to X de l’artiste malgache Joël Andrianomearisoa. Cette série apparaît comme un chapitre unique avec une série de dix tableaux.
L’artiste et la galerie ATLANTIC dédient l’intégralité des fonds de l’exposition au Cercle des Ami.es de la Fondation Zinsou afin de permettre de financer les différentes actions de la Fondation, dont la gratuité du Musée et ses activités au profit des Béninois comme l’Atelier des Petits Pinceaux.
Chaque série de l’artiste réprésente un chapitre intime du roman qui s’écrit à chaque nouveau projet. Un chapitre qui pourrait se lire comme une nouvelle indépendante. Si, de prime abord, on y reconnaît les figures de style classique de l’artiste, telles les allitérations de textile noir qui rythment les toiles, on est frappé par l’audace du choix des textiles, qui tranchent violemment avec les séries qui le précèdent, telles les Herbes folles du vieux logis. Le pagne qui sous tend la construction de l’oeuvre peut se lire comme une anacoluthe poétique.
L’artiste rompt avec l’abstraction colorée et s’empare du motif. Mais le motif ici n’est pas ce qu’il semble être : la feuille de patate douce ou l’hirondelle ne peuvent être lues à l’aune de ce qu’elles semblent représenter. L’artiste travaille avec ce qui fait l’essence du pagne et avec ce qui lui donne son importance au sein des sociétés ouest africaines, sa symbolique et le texte qui le sous-tend. En cela le textile hollandais n’est que le support de l’émotion, de la poésie ou de la violence qu’incarnent ses motifs. Finalement, on pensait avoir rompu avec l’abstraction mais elle se retrouve ici dans la décoréllation entre la présence du motif et son importance qui ne tient pas à ce que l’on voit mais à la symbolique qu’il contient.
En utilisant un textile si lointain de sa pratique, l’artiste semble rendre hommage à un territoire qui incarne plus que les limites de sa géographie et se pose en symbole d’un continent. L’ancrage en Afrique de ces dix oeuvres n’est pas celui du pagne hollandais qui lui donne sa matérialité, mais la fine compréhension des codes les plus importants de la société, l’hommage aux femmes qui ont construit ce patrimoine et à celles qui matérialisent l’œuvre - dans la trame de ce tissus semblent se rejoindre les femmes de Cotonou et celles de Madagascar - mais aussi la question des racines et de l’ancrage de l’artiste, qui évoluant dans un espace traversé par les violences de l’histoire, cherche à remettre en lumière l’émotion, la poésie et la nostalgie qui lui ont longtemps été dénié. Les couches de textiles comme les nombreuses pages d’un épais roman, comme les pièces de pagne qui s’empilent sur les marches de l’escalier de Tokpa, comme un mille-feuilles d’histoires et de légendes. Les textiles sortent du cadre comme si ces légendes devaient s’absoudre du formalisme habituel aux tableaux.
Le centre de thérapie de Louis Oké-Agbo à Porto-Novo est un lieu unique où l’art est un moyen d’aider les personnes atteintes de maladies mentales et de handicaps. Cet artiste et photographe béninois a ouvert le centre en 2017. Le centre prend en charge des femmes et des hommes touchés par des problèmes psychologiques et comportementaux ainsi que des handicaps. Dans cette cour aménagée en studio et donnant sur l’une des rues de Tokpota -un quartier populaire de Porto Novo- les patients dansent, jouent des percussions, prennent des photos, dessinent et peignent. C’est un lieu de liberté d’expression totale pris en charge par des bénévoles, des artistes, des psychologues et des spécialistes de l’art-thérapie.
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Pour la première fois de son histoire, le Bénin participera à la 60e Exposition internationale d’art - La Biennale di Venezia, du 20 avril au 24 novembre 2024.
Intitulée “Everything Precious Is Fragile”, l’exposition explore la riche histoire du Bénin à travers les thèmes de la traite négrière, de la figure de l’amazone, de la spiritualité et de la religion vodun. Elle aborde également le monde contemporain avec la philosophie Gèlèdé, et met spécifiquement en valeur la notion de « rematriation » - traduction féministe de l’idée de la restitution de connaissances.
L’équipe curatoriale, composée du célèbre commissaire d’exposition Azu Nwagbogu, de la curatrice Yassine Lassissi, et du scénographe Franck Houndégla a sélectionné les quatre artistes de renom qui représenteront le Bénin à cette 60e édition. Les artistes sélectionnés sont Chloé Quenum, Moufouli Bello, Ishola Akpo et Romuald Hazoumè.
Emmenés par Azu Nwagbogu, ils tâcheront de nous raconter une histoire du féminisme africain et singulièrement béninois. « Le Bénin sera alors, pour reprendre la formule de Léopold Sédar Senghor, au grand « rendez-vous du donner et du recevoir » », souligne José Pliya, délégué général (commissionner) du Pavillon Bénin à la 60e Exposition Internationale de la Biennale de Venise.
Cette participation marque l’engagement du Bénin à promouvoir activement sa scène artistique et culturelle. Elle s’inscrit dans le cadre de la restitution, en 2021, de 26 trésors royaux spoliés lors de la conquête coloniale du royaume du Danxomè par la France. L’exposition “Art du Bénin d’hier et d’aujourd’hui : de la Restitution à la Révélation” qui s’en est suivie à Cotonou et dont le volet contemporain poursuit son itinérance dans plusieurs pays du monde, a préparé le terrain pour la présence du Bénin à la Biennale de Venise.
Le Pavillon du Bénin à la Biennale de Venise est mis en oeuvre par l’Agence de développement des arts et de la culture (ADAC) pour le compte du ministère du tourisme, de la culture et des arts.
« Retraçant l’histoire des reines africaines, elle nous confronte à l’absence d’images et de récits, et à une histoire qui a été effacée et transformée.
Couverture souple avec 1 rabat, reliure suisse, couleurs et noir/blanc, 96 pages, 22 × 30 cm, français/anglais
Éditions Fondation Zinsou, Collection Archives du Présent
ISBN 978-2-9580110-8-6
Publié pour accompagner la représentation du Bénin par Ishola Akpo lors de sa participation inaugurale à la 60e Biennale Arte de Venise. Publié par la Fondation Zinsou, avec Contemporary A, Sabrina Amrani Gallery et Atlantic Art Space.
Né en Côte d’Ivoire en 1983, de parents béninois, Ishola Akpo vit et travaille à Cotonou (Benin). Il explore les cultures des communautés du Bénin et s’intéresse tout particulièrement aux problématiques identitaires. Artiste visuel multimédia, Ishola Akpo joue sur les liens ténus entre tradition et modernité.
C’est à partir d’histoires familiales ou de personnages historiques parfois oubliés qu’Ishola Akpo tisse des récits humanistes contemporains. L’artiste situe le féminin au cœur de sa pratique, telle une figure ‘clé’ des transformation sociétales. En 2014, il présente la série L’essentiel est invisible pour les yeux. En se fondant sur une histoire intime, Ishola illustre la dot de sa grand-mère, tout en insistant sur le poids de l’héritage immatériel. Ce projet l’a amené à explorer les évolutions sociales, à en questionner les fondements, et à interroger notre capacité à comprendre le passé, tout en construisant au présent, dans un monde en perpétuelle mutation.
À la manière d’un historien, il entremêle récits personnels et culturels, analogiques et numériques, récents et anciens, en variant les jeux d’échelles.Dans l’œuvre d’Ishola Akpo, le temps s’effondre. Passé et présent convergent dans une fusion des horizons. Pour sa série “Agbara Women” (2021), Ishola invite des femmes de son entourage à recréer les portraits de Reines et de femmes de pouvoir du continent africain. Il rétablit les femmes dans le rôle prééminent qui est le leur, celui de régulatrices de la société. Ce sont des “Grandes Royales”, des reines oubliées de l’histoire qu’il réhabilite et qu’il rappelle à notre bon souvenir.
En 2022, Ishola Akpo élargit ce corpus en initiant une nouvelle série intitulée Traces d’une Reine, pour laquelle il utilise des archives, pour porter témoignage des Royaumes du Bénin et d’autres royaumes africains. Il coud au fil rouge sur cette toile de fond, des portraits de Reines contemporaines. Cette création a nourri sa proposition pour le pavillon du Bénin à la Biennale de Venise.
Le travail d’Ishola Akpo a été exposé entre autres : au musée COBRA (Pays- Bas - 2022), Les rencontres de Bamako (Biennale Mali - 2022), au musée MO.CO (France - 2021) Le musée de l’Histoire de l’Immigration, (Palais de la Porte Dorée, Africa 2020 - Paris), Weltkulturen Museum Francfort (Allemagne), Lagos Photo Festival (Nigeria, 2023), Fondation Zinsou (Bénin - 2019 et 2023).
En 2024, Ishola Akpo à représenté le Benin lors de la 60e Biennale de Venise aux côtés de Romuald Hazoumè, Moufouli Bello et Chloé Quenum.
Née en 1987, Moufouli Bello est une artiste plasticienne béninoise, elle vit et travaille entre Cotonou (Benin) et Bruxelles (Belgique). Juriste de formation, elle s’est d’abord tournée vers le droit social, le journalisme, la photographie et l’écriture. Son intérêt pour les questions identitaires l’a amenée à étudier les structures idéologiques et la manière dont les cultes, les traditions, la culture, la politique et les technologies impactent et déterminent notre modèle de société et notre identité.
Sa pratique artistique s’est affirmée en 2012 avec sa participation à l’exposition « l’homme debout » organisée par la Fondation Zinsou au Bénin. En 2016, elle est lauréate de l’Institut Français et de la Cité internationale des Arts de Paris, où elle poursuit son projet « Papyrus » sur les questions identitaires et les signes d’appartenance communautaire et ethnique. En 2017, elle prend part à trois projets majeurs : « Amazones » (Le Centre, Abomey Calavi), « Le grand festin » (Galerie Mario Mauroner, Vienne) et « Afrique au cœur » (Villa Abdelatif, Alger). L’année suivante, Moufouli Bello participe à plusieurs projets dont “Homo planta” de la Fondation Blachère en France.
En 2019, elle est sélectionnée au Fresnoy - Studio national des arts contemporains, où elle approfondit sa pratique autour des médiums numériques et vidéo. Son projet «Lissa, a conversation with God» interroge la violence sociale induite par les religions monothéistes, et les fantasmes messianiques autour de l’intelligence artificielle. L’œuvre «WINDOW WITH A VIEW» réalisée en première année, sur l’envoi de déchets radioactifs en Afrique depuis l’Europe, lui a valu un prix de l’ADAGP en France et a été sélectionnée pour l’exposition «L’Afrique vue par ses photographes, de Malick Sidibé à nos jours» au Musée Mohammed VI d’Art Moderne et Contemporain en 2021.
Elle poursuit ses recherches dans le cadre d’un doctorat en Arts et Sciences Sociales à l’ENSAV La Cambre, sur l’impact de l’art comme outil de création de nouveaux espaces de droits.
En 2024, Moufouli Bello à représenté le Benin lors de la 60e Biennale de Venise aux côtés de Romuald Hazoumè, Chloé Quenum et Ishola Akpo.
À côté de la Fondation Zinsou
Ouvert du mercredi au dimanche de 11h à 17h
Et sur rendez-vous
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